Les religions du Tibet

" Les Tibétains accordent une place importante à la religion. Cependant, il serait faux de penser que tous les Tibétains sont religieux. Certains, influencés par la pensée occidentale moderne ou par le communisme, sont agnostiques voire athées. Néanmoins, pour comprendre certains aspects de la société et de la culture tibétaines, il est indispensable de connaître le bön et le bouddhisme. "

 

(Source de cette page : Nicolas Tournadre et Sangda Dorje, Manuel de Tibétain Standard, L'Asiathèque, 2013)


བོན།

Le bön

གངགས་ཏི་སེ།

Le Mont Tise (ou Mont Kailash)

" Selon la tradition bön, le Mont Tise, appelé Kailash dans la tradition hindoue, est considéré comme étant le centre du monde ou encore le « nombril de la terre ». Cette montagne sacrée se trouve au Tibet occidental, dans la région de Ngari. Le royaume de Zhangshung, qui fut annexé au début du VIIè siècle par l’empereur Songtsän Gampo, se situait aux environs du Mont Tise, tout comme la terre mythique d’Ölmo Lungring. C’est là que naquit Tönpa Shenrap Miwo, l’ « Excellent Shen, Chef-des-Hommes », fondateur de la religion bön. La nature historique ou mythique du maître demeure problématique, mais, quoi qu’il en soit, son nom est mentionné dans de nombreux textes et récits hagiographiques, dont les plus anciens remontent au XIè siècle.

 
Les enseignements bönpo s'intéressent essentiellement à l'origine du monde ainsi qu'à la création des êtres. Ils concernent également les rituels liés la vie quotidienne ainsi qu'au passage dans l'au-delà. Les doctrines bönpo véhiculent une vision du monde purement tibétaine et des concepts véritablement indigènes, se distinguant en cela du bouddhisme tibétain qui est d'origine indienne.

 

Au cours de son évolution, la religion bön a adopté les notions de karma et de renaissance empruntées au bouddhisme et s'est organisée dans le cadre canonique que l'on appelle « Les Neufs Chemins du Bön  ».

 

Le bouddhisme, dès son introduction au Tibet au milieu du VIIIè siècle, a essayé d’écarter les croyances bönpo. D’une façon lente mais inexorable, la population s’est progressivement convertie au bouddhisme. Toutefois cette conversion n’a jamais été totalement achevée. Dans beaucoup de régions du pays, y compris au Tibet central, il y avait encore avant 1959 des institutions monastiques et des temples bönpo. La plupart ont été détruits avant et pendant la révolution culturelle, mais certains ont été reconstruits depuis le début des années 1980.

 

Dans les populations bönpo éparpillées à travers l’ensemble du Tibet, il est intéressant de noter le rôle très important des rituels consacrés aux divinités des montagnes dont l’origine remonte jusqu’au mythe du premier roi, fondateur de la nation tibétaine.

 

La religion bön a subi de multiples influences et intégré de nombreuses notions provenant du bouddhisme tibétain, à tel point que le grand savant gelugpa Thubkän Chökyi Nyima (1723-1802) a déclaré qu’il n’était pas possible de distinguer clairement les deux religions. En revanche, pour le célèbre chercheur britannique D. S. Snellgrove, la religion bön représente la vraie religion du Tibet dans la mesure où elle n’a rien rejeté et s’est enrichie en absorbant de nouveaux éléments. "

 



Plus d'images du Mont Kailash et du Tibet sur le site de Jan Reurink

le bouddhisme

" Sous sa forme tantrique (« Vajrayana »), le bouddhisme est une philosophie religieuse non théiste (elle nie l’existence d’un Dieu créateur) qui met l’accent sur l’impermanence du monde et implique la croyance en la loi de causalité (« karma ») ainsi qu’en la réincarnation ou la renaissance.

 

Le but de l’enseignement du Bouddha, son « Dharma », est la reconnaissance de la nature ultime de l’esprit et la libération des passions et des émotions négatives qui obscurcissent constamment notre état mental.

 

Parmi les moyens utilisés, on peut citer la réflexion et l’introspection, la méditation, la prière, l’utilisation de mantra (formules sacrées), d’instruments rituels et de mudra (gestes symboliques), ainsi que la pratique de divers yogas et d’exercices psycho-physiologiques.

 

 

On distingue actuellement quatre écoles fondamentales du bouddhisme tibétain : les Nyingmapa, les Kagyupa, les Sakyapa et les Gelugpa. Ces écoles ne se différencient que par certains rituels ou par l’accent mis sur telle ou telle pratique, mais elles sont dans leur essence identiques.

 

Le Dharma, sous sa forme tibétaine, a sans doute été influencé par la pensée et les rituels bönpo, ainsi qu’une forme tardive du bouddhisme de l’Inde du Nord, ce qui peut expliquer la grande originalité et la spécificité du bouddhisme tibétain.

 

Dans les monastères correspondant à ces diverses écoles vivent des moines et des nonnes qui ont contracté un ensemble de vœux dont ceux de chasteté et d’abstinence d’alcool ou d’autres drogues. Sauf dans le cas des Gelugpa, ces écoles comptent aussi des religieux mariés. Les maîtres vénérés (moines ou mariés) qui enseignent le Dharma sont qualifiés de lamas.

 

 

Les vies successives d’un grand maître forment une lignée de transmission des enseignements. Il existe de telles lignées dans toutes les écoles du bouddhisme tibétain. D’après la tradition, à la mort d’un tel maître, des lamas compétents se mettent en quête de la réincarnation du maître sous la forme d’un jeune enfant qui est appelé trülku « corps d’émanation ». Les grands maîtres vénérés d’une lignée reçoivent le titre de rinpoche, qui signifie littéralement « précieux ».

 

La pratique religieuse quotidienne, les pèlerinages, la circumambulation autour des montagnes et les fêtes religieuses illustrent constamment l’extraordinaire ferveur religieuse et la foi populaire des Tibétains. Certains pratiquants vont même jusqu’à ‘se prosterner’ sur des milliers de kilomètres pour venir vénérer la statue du Bouddha Sakyamuni qui se trouve dans le grand temple de Lhassa.

 

 

Des milliers de monastères et temples qui existaient avant 1959 ont été détruits avant et pendant la révolution culturelle. Mais depuis le début des années 1980 de nombreux monastères ont été reconstruits à l’emplacement des anciennes ruines. "


" Outre les bouddhistes et les bönpo, il faut encore mentionner l’existence d’une toute petite minorité de Tibétains musulmans composée de deux communautés distinctes : les Khache, originaires du Cachemire, et les Horpaling, originaires de Chine. L’implantation de l’islam au Tibet date du XVIIIè siècle et l’on trouve deux mosquées dans les vieux quartiers de Lhassa. On trouve également au Ladakh (Inde) et surtout au Baltistan (Pakistan), des populations tibétophones qui sont converties à l’islam depuis le XVIè siècle. Signalons enfin l’existence de quelques églises chrétiennes au Tibet oriental. "